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Mouvements: retour progressif aux années 50?

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August 2010


Mouvements: retour progressif aux années 50?

Notre maison d’édition, qui s’appelait alors Hugo Buchser SA, du nom de son fondateur, a publié jusqu’en 1986 le fameux Guide des Acheteurs. C’était avant Internet, un autre monde. Y étaient répertoriées toutes les adresses du vaste tissu industriel horloger de la Suisse. Par curiosité, je suis allé dans nos archives et ai sorti un Guide des Acheteurs de 1950. J’ai tout de suite cherché à la rubrique “Mouvements” pour savoir qui à l’époque fabriquait de ces mouvements. J’ai répertorié... 268 fabricants de mouvements ancre (sans compter donc les fabricants de mouvements à cylindre ou de mouvements Roskopf). Parmi ceux-ci, 50 à Bienne, 50 à La Chaux-de-Fonds, 28 à Genève, 24 à Tramelan, 17 à Granges.

Un continent aujourd’hui disparu, englouti, absorbé, avalé progressivement – dès les années 30, de fait – par une suite d’entreprises de plus en plus puissantes: Ebauches SA, ETA, l’ASSUAG-SIHH, la SMH en 1985 puis enfin Swatch Group en 1997. A cette époque, l’immense majorité des ébauches suisses provient d’ETA.

Et puis, petit à petit, de nouveaux mouvements pointent çi et là. A la faveur du regain progressif et spectaculaire de la montre mécanique, les maîtres-horlogers indépendants sont parmi les premiers à démontrer que l’horlogerie mécanique n’a pas encore abattu toutes ses cartes, loin de là, et que d’immenses champs restent encore à explorer. C’est l’acte de naissance d’une “nouvelle” horlogerie mécanique qui, peu à peu, va contaminer tout le monde. Mais entre une production artisanale, aussi parfaite soit-elle, et les réalités de la production à niveau industriel, il y a plus qu’un pas, un gouffre.

Passer par-dessus ce gouffre implique de forts investissements. Les horlogers hésitent, après tout, ETA est là, avec ses inusables tracteurs éprouvés de longue date. Mais le coup de fouet final est à nouveau donné par Nicolas Hayek qui, en annonçant en 2002 qu’ETA cessera de livrer ébauches et kits dès 2006 (mesure reportée à début 2011) lance la course à la verticalisation. Celle-ci est rendue possible, financièrement, par le fait qu’entretemps, de puissants groupes concurrents se sont constitués, Richemont et LVMH, que Rolex s’est presque intégralement autonomisée et que tout le monde vogue sur une des plus grandes vagues euphoriques de l’histoire horlogère helvétique.

Aujourd’hui, alors que les marchés vont moins bien, un nouvel outil industriel fonctionne et est prêt à monter en puissance. Un nouveau tissu industriel s’est aussi partiellement reconstitué. Les initiatives pullulent. Il va falloir désormais rentabiliser ces très importants investissements. Europa Star dresse la carte des forces en présence. En deux parties: dans le numéro de septembre nous examinons les alternatives directes à ETA, et dans celui d’octobre/novembre, nous commenterons l’explosion des mouvements “in house”.

Source: Europa Star Première Vol.12, No 4