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Hermès en courbes et tout en fluidité

April 2013


Deux grandes maisons parisiennes, Hermès et Chanel, qui ont toutes deux, dans des styles fort différents, acquis leur pleine légitimité horlogère, comptent sur leur “pavillon” pour faire passer le message.

C’est à un architecte raffiné, s’inspirant tout aussi bien des pavillons de thé du Japon impérial que des technologies les plus futuristes ou les plus douces, que la maison Hermès a confié la création et la réalisation de son nouveau stand – ou “pavillon” - dans le cadre de BaselWorld. Nul hasard en ceci. Car la finesse et la sensibilité du célèbre architecte japonais Toyo Ito semblent en tous points correspondre à la philosophie de la maison parisienne. Mieux, selon Pierre-Alexis Dumas, directeur artistique d’Hermès, “ce nouveau pavillon est la traduction formelle d’une philosophie partagée, à portée universelle. Son dessin exalte les valeurs qui fondent notre maison : l’artisanat, l’attachement au travail de la main et à la noblesse des matières naturelles comme le bois, la maîtrise du temps, la précision et l’innovation.”

Cette communion d’esprit entre Ito et Hermès a donné naissance à “un vaisseau nomade de bois et de verdure”. Soit une structure légère et aérienne, un espace ouvert, un lieu apaisant, chaleureux, accueillant, destiné à être le fidèle ambassadeur de la marque.

Hermès en courbes et tout en fluidité Hermès en courbes et tout en fluidité

Au visiteur qui s’en approche, le pavillon se présente comme une résille de lattes de bois entrecroisées qui semble onduler, animée d’un mouvement semblable à celui de la houle. 624 lattes de hêtre, plates, galbées ou cintrées, nulle n’étant semblable à l’autre, se croisent et s’entrecroisent savamment, se présentant comme une paroi opaque à qui la longe, mais offrant à qui s’y s’arrête des échappées vers l’atrium et la mezzanine intérieurs. Cette peau de lames de bois, semblable aux plissés d’une jupe suspendue au vent, est maintenue par une ossature intérieure de métal et de verre. Entre la peau et l’ossature serpente un ruban de 167 plantes de camélia, d’eucalyptus, de magnolia ou de citrus qui forment un étroit jardin s’enroulant, s’évasant et se rétrécissant tout autour du pavillon (on connaît l’interpénétration entre bâti et nature propre à l’architecture japonaise). Des éclairages indirects dissimulés dans les plantes accentuent encore l’ondulation rythmique du pavillon auquel on accède par une large ouverture d’angle, semblable à la proue d’un navire.

ARCEAU CHRONO BRIDON d'Hermès
ARCEAU CHRONO BRIDON d’Hermès

A l’intérieur, passé un vaste et calme atrium, on accède aux bureaux, aux espaces de présentation, on grimpe à la mezzanine par un escalier de bois et de métal. L’espace est habillé de tissus teints naturellement, dont les tons jaune, orange et rouge évoquent la palette Hermès, et la texture celle d’écorces d’arbre, conférant à l’espace la chaleur et l’intimité d’une maison (grande maison en vérité: 1040m2 utiles, 25 salles, 20 bureaux, 4 salles de conférence, 1 business center, le tout étant monté en 5 semaines et tenant dans 200 caisses et palettes).

Et les montres? Elles se présentent à l’intérieur de fleurs en forme de bulles qui poussent sur des tiges d’acier dispersées dans l’atrium ou surgissent hors des lattes comme si, telles des plantes vivaces, elles s’étaient glissées entre les ondulations du bois pour aller fleurir à l’extérieur.

Proximité intellectuelle, sensibilités et valeurs partagées, souci commun du savoir-faire, respect partagé de l’environnement sont au coeur de cette réussite en forme de subtil et léger équilibre entre tradition et expérimentation.

Hermès en courbes et tout en fluidité

Toyo Ito: “la quête de la fluidité”
Né en 1941, diplômé de l’université de Tokyo en 1965, Toyo Ito est d’abord l’architecte d’une osmose entre bâtiment et nature. Sa Tour des Vents (Yokohama, 1986) en est l’illustration emblématique. Haute de 21 mètres, elle paraît totalement blanche, le jour, tandis que la nuit elle se transforme en un signal lumineux qui change continuellement sous l’influence des vents. Architecte de la fragilité en lutte contre la pesanteur, Toyo Ito démontre au fil de ses projets que la solidité d’un bâtiment tient beaucoup plus à son adaptation au terrain qu’à sa surcharge structurelle. Sa médiathèque de la ville portuaire de Sendaï (2000) a résisté au terrible séisme de 2011. Il a reçu le Lion d’or à la Biennale d’architecture de Venise, en août 2012, pour son installation “Home for All” exprimant la collaboration de ses équipes avec les habitants des zones sinistrées par le tsunami, dans l’édification d’abris temporaires.

Source: Europa Star Première Vol. 15, No. 2

Quand l’architecture est le message
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